La forclusion et la prescription sont toutes les deux des sanctions civiles, mais dont les effets quâelles produisent sont diffĂ©rents. En effet, les actions en justice ne peuvent pas ĂȘtre perpĂ©tuelles du fait de lâinsĂ©curitĂ© juridique quâelles engendrent. Ainsi, la procĂ©dure civile comporte des dĂ©lais de forclusion qui obligent les parties Ă exercer telle ou telle action dans un intervalle de temps prĂ©cis.
De la mĂȘme maniĂšre, il convient de limiter les causes dâinterruption ou dâincertitude. Câest pourquoi la prescription et la forclusion sâinscrivent toutes les deux dans cette perspective. Toutefois, il est nĂ©cessaire de les diffĂ©rencier.
La définition de la forclusion
La forclusion est une sanction de lâinertie dâune personne face Ă lâĂ©chĂ©ance du dĂ©lai imparti par la loi pour exercer un recours devant la justice et ainsi faire reconnaĂźtre ses droits.
Il sâagit dâune sanction civile et non pas pĂ©nale. Ce quâil faut savoir, câest quâune personne (physique ou morale) dispose dâun dĂ©lai pour faire appel ou pour se pourvoir en cassation et passĂ© ce dĂ©lai son recours nâest plus en mesure dâĂȘtre recevable.
La forclusion est par consĂ©quent une fin de non-recevoir et une exception. De plus, elle est dâordre public et doit donc ĂȘtre soulevĂ©e dâoffice. On peut citer le dĂ©lai de forclusion de dix ans pour agir contre les constructeurs.
La définition de la prescription
La prescription est un mode dâacquisition de droits ou de leur extinction par lâĂ©coulement dâun dĂ©lai. Il sâagit dâune prĂ©somption qui peut crĂ©er ou Ă©teindre des droits. La prescription est acquisitive lorsque lâĂ©coulement du dĂ©lai permet dâacquĂ©rir un droit (Voir le cours complet sur lâusucapion ou prescription acquisitive ici).
Elle est extinctive lorsque lâĂ©coulement du dĂ©lai fait perdre un droit ou interdit un recours. PassĂ© le dĂ©lai, lâaction en justice, quâelle soit civile ou pĂ©nale, nâest plus recevable.
Par ailleurs, selon lâarticle 2219 du Code civil, un droit est Ă©teint du fait de lâinaction de son titulaire pendant un certain temps. Ces droits sont des droits rĂ©els, personnels, mobiliers ou immobiliers.
Le dĂ©lai de droit commun est de dix ans. Il en va de mĂȘme en cas de dommage corporel ou pour lâexĂ©cution des dĂ©cisions judiciaires et administratives. Ce dĂ©lai est reportĂ© Ă 30 ans pour les actions rĂ©elles immobiliĂšres et pour la rĂ©paration des dommages Ă lâenvironnement.
La différence entre la forclusion et la prescription
Quoique similaires, la forclusion et la prescription sont distinctes lâune de lâautre.
Les caractĂšres de la forclusion et de la prescription
La forclusion est spĂ©cifique Ă une action tandis que la prescription est gĂ©nĂ©rale. Ainsi, la forclusion est toujours prĂ©vue par un texte. Par exemple, en matiĂšre dâappel, un plaideur dispose dâun mois pour agir. De surcroĂźt, elle est soulevĂ©e dâoffice par le juge, car elle est dâordre public, ce qui nâest pas le cas pour la prescription.
Les finalités de la forclusion et de la prescription
Dâune part, la forclusion est punitive. Elle sanctionne lâinertie considĂ©rĂ©e comme une nĂ©gligence de la partie dĂ©tentrice de lâaction en justice. Elle a en effet Ă sa disposition un dĂ©lai prĂ©vu par la loi pour exercer ses droits. Ce dĂ©lai est par ailleurs limitĂ© Ă une action prĂ©cise et il varie selon lâaction considĂ©rĂ©e.
Dâautre part, la prescription en matiĂšre civile a plusieurs finalitĂ©s notamment une finalitĂ© sĂ©curitaire, une finalitĂ© probatoire et une finalitĂ© morale. Dâabord, elle permet de consolider les situations du dĂ©biteur.
Ensuite, elle libĂšre le dĂ©biteur de lâobligation de preuve par le biais de lâinterdiction dâactions hors dĂ©lai. Enfin, comme en matiĂšre de forclusion, elle est une sanction de la nĂ©gligence du crĂ©ancier inerte.
Le régime de la forclusion et de la prescription
Lâinterruption ou la suspension de la prescription
Le dĂ©lai de prescription peut ĂȘtre suspendu ou interrompu. La suspension arrĂȘte le dĂ©lai en cours sans effacer celui dĂ©jĂ Ă©coulĂ©. Les causes de suspension peuvent ĂȘtre la loi, une convention ou la force majeure. Il faut cependant prĂ©ciser que deux nouvelles causes de suspension sont apparues avec la rĂ©forme du Code civil. Il sâagit de la mĂ©diation et de la conciliation.
Ces derniÚres sont des moyens de rÚglement amiable des différends institués pour désengorger les tribunaux et pour favoriser encore plus la célérité des rÚglements des litiges.
Selon lâarticle 2238 du nouveau Code civil, la prescription est suspendue Ă compter du jour oĂč les parties ont convenu de recourir Ă la mĂ©diation, la conciliation ou, sauf en cas dâaccord Ă©crit, Ă compter du jour de la premiĂšre rĂ©union de mĂ©diation ou de conciliation, et ce, aprĂšs la survenance dâun litige.
Le dĂ©lai de prescription recommence Ă courir pour une durĂ©e qui ne peut en aucun cas ĂȘtre infĂ©rieure Ă six mois, et ce, Ă compter de la date Ă laquelle lâune des parties ou les deux, le mĂ©diateur oĂč bien le conciliateur, dĂ©clare que la mĂ©diation ou la conciliation est terminĂ©e.
Toutefois, lâinterruption de la prescription fait courir un nouveau dĂ©lai qui commence Ă partir de lâacte interruptif comme un acte dâinstruction par exemple.
Il convient de prĂ©ciser ici que lâinterruption est limitĂ©e, car les cas dâinterruption des dĂ©lais sont trĂšs rĂ©glementĂ©s et encadrĂ©s. Lâassignation, comme cause dâinterruption, doit concerner la demande dirigĂ©e contre celui quâon veut empĂȘcher de prescrire.
Lâinterruption de la forclusion
La forclusion ne peut quâĂȘtre interrompue et non pas suspendue. Elle est interrompue par une demande en justice, mĂȘme en rĂ©fĂ©rĂ©, et ce, malgrĂ© un vice de procĂ©dure.
Lâabsence de possibilitĂ© dâamĂ©nagement du dĂ©lai de forclusion
Le dĂ©lai de forclusion est obligatoire, dâordre public et doit ĂȘtre ainsi soulevĂ© dâoffice par le juge. Outre son caractĂšre obligatoire, il ne peut ĂȘtre amĂ©nagĂ© par un accord quelconque.
Toutefois, la rigiditĂ© et la sĂ©vĂ©ritĂ© de la forclusion sont tempĂ©rĂ©es par la procĂ©dure de relevĂ© de forclusion. Ce dernier est proche de la suspension de la prescription. Par exemple, le dĂ©lai de forclusion est de dix ans, mais il peut ĂȘtre interrompu par une assignation en justice en rĂ©fĂ©rĂ© ou par une mesure conservatoire.
En outre, en matiĂšre de procĂ©dure collective dâapurement du passif, le crĂ©ancier a lâobligation de dĂ©clarer sa crĂ©ance dans les deux mois sous peine de forclusion.
Cependant, il est aussi possible pour le crĂ©ancier forclos dâexercer une action en relevĂ© de forclusion et dâobtenir gain de cause sâil arrive Ă prouver quâil nây a pas eu nĂ©gligence de sa part, mais du fait dâautrui en cas de mauvaise foi notamment.